mercredi 13 janvier 2010

Entre l'évier et la table de la cuisine


La terre de la folie est au quartier latin

Ce qui me choque dans le dernier film de Luc Moullet, diffusé en avant-première pour le gratin cinéphile parisien dont je suis flaté de faire partie de temps en temps, ce n'est pas l'incongruité de son propos. (A mon grand étonnement, beaucoup s'y sont fait prendre parmi les spectateurs. Qu'un public a priori si cultivé se demande sincèrement s'il y a vraiment un taux anormalement élevé de pétage de plomb entre Digne et Manosque, c'est finalement ce qu'il y a eu de plus cocasse au cours de cette soirée.)

Non, ce qui me choque, c'est que Luc Moullet "le rebelle", pour reprendre le titre de son film préféré, ait utilisé des ficelles indignes d'un cinéaste d'une si grande réputation, de celles qui flattent les instincts les plus vulgaires tapis en chacun de nous. Car moi aussi j'ai ri, et j'ai mal d'avoir ri. D'avoir ri aux discours maladroits et soigneusement triés des personnes interrogées sur ces meurtres, probablement persuadées de participer à un reportage sérieux, essayant donc de trouver les mots supposés justes pour la circonstance, c'est-à-dire les mots neutres du gendarme, du témoin modèle dans les émissions de télévision à grande écoute ("c'est alors que j'ai trouvé l'individu allongé sur ma femme, ce qui m'a paru un peu anormal"... je cite de mémoire en déformant un peu), inconscients de la duperie.

Si tous les témoignages avaient été joués par des acteurs, conscients des intentions du film et cherchant à produire l'effet comique souhaité par le réalisateur, je suis tenté de penser que ce film serait une merveille. Or seuls Moullet et quelques complices sont dans la confidence et pour cause. Il font d'ailleurs leur travail à merveille, mais ils ont beau jeu, sous prétexte de pratiquer l'autodérision, de se dire à égalité avec les témoins piégés, livrés à la moquerie des spectateurs du grand monde, sans possibilité pour eux de se défendre. Le jeu pour un acteur est une armure qui le protège du jugement des spectateurs, parce que le jugement vise le jeu et non la personne. Puisque chez Moullet ces gens ne "jouent" pas, tous les coups portent et blessent, d'autant plus facilement qu'on s'est bien gardé de les prévenir qu'ils allaient figurer dans une comédie.

Je suis navré que monsieur Straub présent ce soir, ne comprenne pas cela ou ne veuille pas le comprendre pour protéger son copain. Navré qu'on oublie qu'il n'y a d'art que dans la conscience de son art, que dans l'intention de faire une oeuvre. On ne fait pas d'oeuvre à l'insu des protagonistes, au mieux on fait de la propagande, au pire on fait de la télévision.

Loin de Chaplin ou de Buñuel, la terre de la folie n'est donc pas une oeuvre d'art, mais un film raté parce que malhonnête. J'en suis bien triste parce que je ne m'attendais pas à ça de la part de Luc Moullet, bien triste parce que le reste du film, d'une vraie valeur comique, est bêtement gâché par cette irruption de cynisme télévisuel.

lundi 11 janvier 2010

Toit en hiver

Ordinateur en panne, mises à jour difficiles, je fais de mon mieux.

dimanche 3 janvier 2010

Paris déserté


Elles

J'ai pris deux après-midis pour visiter l'expo elles@centrepompidou. Deux jours pour ne pas saturer, pour à peu près tout bien regarder. J'ai aussi profité de mon nouveau petit carnet pour noter quelques noms, quelques pensées sur le sexe de l'art. De quoi alimenter des débats très intéressants, mais ce dont je voulais surtout parler là maintenant, c'est de la dernière oeuvre que j'ai vue et failli manquer (une salle perdue au milieu des hommes au fin fond du 5e étage).

Il s'agit d'une photo de Rogi André représentant Dora Maar. Une femme (artiste) photographiée par une autre femme (artiste). Pas de nu, pas de contestation, pas de provocation, même pas un autoportrait, juste un portrait.

Ci-contre une reproduction trouvée sur le site du Centre Pompidou, pour ma collection, pour me souvenir de l'orignal avec émotion. Car je n'ai malheureusement rien trouvé de bonne qualité. J'ai donc légèrement retouché la photo pour que ça soit un peu présentable.

Présentable pour une petite contemplation. Prenez votre temps, je me retire sur la pointe des pieds.